Selon un vieux récit, un épouvantable dragon d'eau hantait la forêt du Rouvray. Il vivait dans les marécages du Malpalu près de la ville de Rouen en France. Depuis plusieurs années, il dévorait les hommes et les animaux de la région tout en semant la terreur. Ce type de dragon était capable de cracher d'énorme quantité d'eau. Personne ne voulait affronter la terrible Gargouille.
Les habitants de Rouen demandèrent l'aide de leur archevêque. Saint Romain accepta de les délivrer de ce monstre. L'archevêque demanda à deux condamnés à mort de l'assister à capturer la bête. En échange, il leur promit la liberté. Un des prisonniers ayant trop peur se désista à la dernière minute et s'enfuit. L'autre se dit qu'il avait tout à gagner puisque de toute façon, il était condamné à mort.
Saint Romain et le prisonnier se rendirent au marécage à l'embouchure de la Seine et au pied du mont Gargan où vivait le dragon. Le courageux évêque s'en approcha lentement. Lorsqu'il fut assez près, saint Romain avec un signe de la croix rendit la terrible bête incapable de leur faire du mal. Elle se coucha aux pieds des deux hommes. Le saint homme enfila son étole autour du cou du monstre. Ensuite, il dit au prisonnier de prendre l'étole et de conduire le dragon en ville.
Elle fut brûlée sur un bûcher en présence de tous les habitants de la ville. La tête et le coup de la gargouille devinrent très durs et ne brûlèrent pas. On jeta les cendres dans la Seine. La tête de la Gargouille fut placée sur le mur de l'église en guise de protection et pour éloigner les esprits malins.
La Gargouille de Rouen est une histoire très intéressante. On y parle d'un type de dragon plus rare vivant dans les marécages et capable de cracher de l'eau. Saint Romain en plaçant la tête du dragon sur le mur de son église va donner naissance à une nouvelle tradition architecturale. Le dragon cracheur d'eau inspire les tailleurs de pierre de l'époque à sculpter des gouttières en forme de tête de dragon crachant l'eau de pluie par la bouche. En éloignant l'eau des bâtiments, elles protégeaient les joints de mortier des murs des cathédrales contre l'érosion. Par la suite, les gargouilles vont devenir ornementales. Les maçons leur ont donné la forme d'animaux laids et horribles. Non seulement leurs formes vont changer, mais aussi leurs fonctions. La gargouille est passée d'un élément décoratif utilitaire à un talisman capable d'éloigner les esprits maléfiques de ces magnifiques constructions imposantes. Quel était cet animal mystérieux ? A-t-il vraiment existé? Le dragon d'eau existe-t-il encore aujourd'hui ? Le mystère demeure entier.